Du saut quantique à l’acte de foi

Nos vies et le cosmos semblent fluides, sans heurts, analogiques. Pourtant, au fond, le monde est segmenté, tumultueux, numérisé. Sommes-nous des vagues ou des particules ? Dans l’univers quantique, peut-être sommes-nous les deux ? Après un siècle de relativité et de mécanique quantique, nous avons découvert toute une série de phénomènes étranges si éloignés de notre pensée intuitive qu’accepter le monde décrit ainsi nous demande presque mettre notre incrédulité entre parenthèses. Pourtant, si nous sommes prêts à croire à des dimensions qui dépassent la physique, à des bifurcations temporelles et même à l’existence de plusieurs univers, pourquoi sommes-nous si prompts à rejeter la vision du monde du point de vue biblique ? Y aurait-il une dimension manquante dans les fondements de la connaissance humaine ?

Au cours du siècle dernier, les physiciens ont élaboré toute une nouvelle conception de ce que nous appelons la réalité. Tout comme les lois du mouvement établies par Isaac Newton furent une révélation à leur époque (une fenêtre ouverte sur la création divine, croyait-il), les théories d’Albert Einstein sur la relativité et sur la relation du temps et de l’espace avec la masse et l’énergie changèrent notre perception du fonctionnement de l’univers à l’échelle cosmique.

À l’échelle quantique, Einstein contribua également à notre compréhension de l’infiniment petit. Il reçut le prix Nobel en 1921, non pas pour la relativité, mais pour avoir découvert que la lumière a des propriétés de particules (de quanta) qui sont à l’origine de l’effet photoélectrique. Cette notion dépasse déjà l’entendement de la plupart d’entre nous, mais imaginez maintenant que la lumière se comporte comme une onde, un flux d’énergie ininterrompu. Poussons un peu plus loin cette réalité fantastique : dans le monde de la mécanique quantique, c’est l’acte d’observation ou de mesure qui fait ressortir l’une ou l’autre des caractéristiques, onde ou particule.

Alors, la lumière, c’est quoi ?

L’interprétation de Copenhague de la mécanique quantique, mise au point par Niels Bohr, Werner Heisenberg et d’autres au milieu des années 1920, établit la théorie selon laquelle la lumière est dans un état appelé « superposition » : les états de particule et d’onde coexistent, ils sont superposés. Cependant, regarder la lumière « annihile la fonction d’onde » de sorte que celui qui mène une expérience consigne soit des points d’énergie (quanta ou particules) soit un tracé d’interférences sous forme d’ondes en interaction.

Bienvenue dans l’univers particulièrement étrange de la physique quantique. L’acte d’observation consciente transforme une probabilité en connaissance. Le savoir annihile la fonction d’onde à partir de ce qui était un halo de probabilité : le néant devient quelque chose.

Il n’est sans doute pas étonnant que cette explication ne fasse pas l’unanimité. Toutefois, il ne se trouve qu’une minorité (outre le bon sen) pour s’y opposer, comme l’a fait le physicien Victor Stenger : « L’idée que des propriétés soient révélées par le seul acte de les mesurer se heurte à notre intuition que l’univers possède une réalité objective, indépendante de l’observateur. »

UNE SCIENCE BIEN ÉTRANGE

Cependant, le rapport entre l’observation et le résultat expérimental est apparemment suffisamment réel. Lors d’une expérience menée en mai 2015, il a été montré que même des atomes présentaient cette dualité onde-particule et qu’ils semblaient retarder leur choix de rôle jusqu’à ce que la mesure soit prise. Ce travail et d’autres études tendent à montrer que la communication peut non seulement reculer dans le temps mais aussi s’effectuer à une vitesse plus rapide que la lumière. L’un des articles remarque que l’expérience « apporte une réfutation quasi parfaite de la vision du monde d’Einstein selon laquelle "rien ne va plus vite que la lumière" et "Dieu ne joue pas aux dés" ».

Néanmoins, ces conclusions ne paraissent pas acceptables ; on voudrait être d’accord avec Victor Stenger, qui s’opposait aussi aux interprétations reposant sur une rapidité supérieure à la lumière. Ce sont des idées difficiles à saisir, bien qu’elles aient été plusieurs fois attestées par des preuves expérimentales au cours du siècle passé. « La bizarrerie doit être affrontée sans hésitation », écrit le physicien Marcelo Gleiser. Ce qu’Albert Einstein appelait spukhafte Fernwirkungen (de mystérieuses actions à distance) semble se produire dans la réalité. « Ces paires de particules enchevêtrées, écrit Gleiser, sont créées et analysées dans de nombreux laboratoires du monde entier. Le fait de mesurer l’une des deux "influence" l’autre instantanément (ou au moins à une vitesse superluminique [plus rapide que la lumière]), quelle que soit la distance qui les sépare. »

« La bizarrerie quantique est-elle un aspect inévitable de la nature, ou pouvons-nous lui donner un sens d’une façon ou d’une autre ? »

Marcelo Gleiser, The Island Of Knowledge

Mais comment est-ce possible si la relativité fait de la vitesse de la lumière la limite infranchissable ? « On ne peut s’attendre à une définition raisonnable de la réalité permettant cette situation », concluait Einstein dans un article de référence paru en 1935, où il exposait qu’il manquait quelque chose à la mécanique quantique, considérée donc comme incomplète.

Comment tout cela se traduit-il dans notre monde macroscopique ? Erwin Schrödinger, l’un des piliers de la théorie quantique, également contemporain d’Einstein, met le problème en perspective avec son expérience du « chat enfermé dans une boîte ». Il s’y moque de l’idée que l’indétermination à l’échelle quantique pourrait être transposée dans le monde ordinaire ; or, les objets macroscopiques, comme un chat, ne peuvent exister dans deux états différents simultanés (en l’occurrence, à la fois mort et vivant).

On peut se demander comment Schrödinger aurait envisagé une itération plus moderne posant en principe que les deux résultats se produisent réellement en parallèle. Ainsi, la théorie des « mondes multiples », présentée par Hugh Everett au milieu des années 1950, affirme que toutes les probabilités existent, mais dans des univers séparés. Par conséquent, chaque possibilité quantique – théoriquement, elles sont illimitées – est un chemin fait d’une succession infinie d’embranchements d’observations et de décisions. Le cosmologiste Paul Davies résume ainsi la théorie d’Everett : « L’univers se divise en deux, un exemplaire contenant un chat vivant, l’autre un chat mort [...]. De manière générale, si un système quantique se trouve dans une superposition de, disons, n états quantiques, alors l’univers se divise en n exemplaires au moment de la mesure. » Le trajet extra-dimensionnel serait un « saut quantique » d’un univers à un autre, éventuellement en remontant le temps sur un autre chemin de l’histoire.

Si c’est vrai, il est inutile de se demander ce qui se produit dans tel ou tel cas puisque, du seul fait de poser la question, cela s’est déjà produit. D’un seul coup, la théorie balaie le paradoxe entre observation et fonction d’onde mais, sauf scénario de science-fiction, il n’y a aucun moyen de tester son existence physique ou sa signification métaphysique. On ne trouvera pas bizarre que certaines personnes perdent de vue la réalité lorsque ces idées sont développées. Effectivement, comme le dit le physicien Rudolf Peierls, « je ne sais pas ce qu’est la réalité ».

RETOUR SUR TERRE

Quelle que soit l’inventivité mise en œuvre pour expliquer l’état de superposition, il reste des questions fondamentales non résolues entre les théories de la relativité et des quanta ; chacune réussit peut-être à décrire l’univers en général ou à l’échelle infra-atomique, mais jusqu’à présent, il n’a pas été possible de concilier les deux.

Néanmoins, comme on pense couramment que le monde est une chose physique réelle, un lieu réel composé d’atomes réels, les équations quantiques qui décrivent ce qui est petit doivent s’harmoniser d’une façon ou d’une autre avec les règles relativistes qui régissent ce qui est grand. Dans l’intervalle, la physique newtonienne classique reste utile pour expédier des boules aux quatre coins d’une table de billard et des satellites dans l’espace. Mais pour résumer, les observations et les mathématiques abstraites de la physique classique de la relativité et des quanta n’ont pas été purement théoriques ; quoique complexes et étranges, les idées qu’elles ont apportées nous ont permis de créer notre monde moderne fait d’électronique, d’informatique, de surveillance et de communication.

« Loin d’être un inconvénient, le caractère insaisissable du domaine quantique est exploité dans le développement de nouvelles technologies révolutionnaires, des virements bancaires sécurisés aux détecteurs ultrasensibles, pour aboutir peut-être à de nouveaux types d’ordinateurs. »

Marcelo Gleiser, The Island of Knowledge

Le système GPS de géolocalisation par satellite est un bon exemple de physique appliquée. Dans sa théorie de la relativité restreinte (1905), Albert Einstein expliquait que le temps et la vitesse sont liés, créant une fusion appelée l’espace-temps. Dans cette relation, plus on se déplace vite, plus le temps semble passer lentement : une horloge donnée avance plus lentement que les horloges qui voyagent à une vitesse différente (le temps est relatif, en fonction de l’observateur et de son cadre de référence). Bien sûr, intuitivement, cela n’a pas de sens, mais c’est la réalité ; les horloges situées à bord des satellites GPS qui tournent en orbite autour de la terre à 14.000 km/h avancent effectivement quelques microsecondes moins vite que les nôtres ici, sur la surface de la planète.

Pour combiner ce fait à la théorie de la relativité générale (1916), laquelle associe espace-temps et gravité, il faut que nos ingénieurs en systèmes GPS compensent aussi l’éloignement des satellites. La gravité déforme l’espace, ce qui fait avancer plus vite les horloges embarquées. Einstein serait ravi de constater que la technologie moderne peut harmoniser tout cela afin que votre système de navigation soit capable de vous dire avec quasi-exactitude quand tourner, ou de guider le pilote automatique pour que votre avion atterrisse en sécurité. Finalement, votre voiture robotisée sera en mesure de s’orienter sans votre aide à bord, en utilisant des systèmes de communication de ce type, aptes à calculer la relativité.

CROIRE EN DES CHOSES IMPOSSIBLES

La technologie évolue rapidement : la fiction se concrétise, le possible se matérialise à partir de l’impossible. Un système GPS est lui-même une sorte de saut quantique, une chose que les générations passées auraient certainement considérée comme de la science-fiction. Cependant, tout en jouissant en temps réel des bienfaits de ces innombrables technologies, nous nous passionnons aussi pour l’avenir que pourrait créer une maîtrise encore plus grande de nos théories physiques et de leurs applications.

Des questions métaphysiques viennent s’imbriquer. Elles sont aussi déroutantes que les théories elles-mêmes : qui sommes-nous et qu’est-ce qui nous permet de découvrir, puis d’appliquer et de manipuler ces règles bizarres de l’univers ? Que se passera-t-il ensuite ?

Que ce soit un voyage temporel grâce à des tunnels cosmiques et le délicat effet papillon (selon lequel le plus petit événement peut changer l’avenir et redessiner le présent), ou bien une déformation dynamique qui tord l’espace-temps et permet de sauter d’un bout à l’autre de l’univers, nous nous accommodons très bien de mettre notre incrédulité entre parenthèses et d’accepter non seulement les théories elles-mêmes mais aussi les formes fictionnelles de la théorie de la relativité et des quanta. Nous voulons croire aux mantras de pensée positive véhiculés par des films comme Que sait-on vraiment de la réalité – Down the Rabbit Hole, ou des livres qui se proposent de nous dévoiler Le Secret. Nous voulons croire au sauvetage imaginaire d’une humanité dysfonctionnelle par des voyageurs À la poursuite de demain ou venus de l’espace Interstellaire.

Nous sommes prêts à le faire, pour l’essentiel, non pas parce que nous sommes physiciens, mais parce que nous aspirons profondément à un avenir meilleur. Comme l’écrivait l’apôtre Jean il y a près de deux mille ans, nous espérons tous qu’un jour, « il essuiera toute larme de leurs yeux, et la mort ne sera plus ; il n’y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur, car les premières choses ont disparu » (Apocalypse 21 : 4, Nouvelle Édition de Genève 1979).

Pourtant, comme nous ne sommes pas sûrs de qui « il » est, nous nous tournons vers la science. « Nous sommes des êtres en quête de signification, note le physicien Marcelo Gleiser, et la science est l’un des produits de notre volonté chronique de donner un sens à l’existence. »

Sur cet aspect lié à la signification et à la croyance, le professeur émérite Lewis Wolpert (University College de Londres) est arrivé à une conclusion intéressante quant à nos motivations. En tant que chercheur en biologie du développement, Wolpert a été l’un des pères des théories sur le développement des schémas biologiques et la formation des tissus chez les très jeunes embryons. Pour le titre de son livre, Six Impossible Things Before Breakfast, six choses impossibles avant le petit-déjeuner, il s’est inspiré de la conversation entre la reine Blanche et Alice dans De l’autre côté du miroir. À un moment donné, face aux extravagances de la reine, Alice répond : « On ne saurait absolument pas croire à l’impossible ».

Bien que Wolpert ne nous recommande pas de suivre exactement le conseil de la reine Blanche (« Essayez encore une fois : prenez une profonde inspiration et fermez les yeux »), il soutient que nous sommes empreints d’une sorte d’« impératif cognitif » qui nous pousse à croire en quelque chose. Selon lui, notre cerveau est un « moteur de croyance ».

« Une motivation puissante nous incite à expliquer par des liens de causalité tous les phénomènes qui nous affectent ; c’est un besoin profondément enraciné d’organiser le monde sur des bases cognitives – monde extérieur et monde intérieur de l’individu. Nous nous accrochons fermement à nos croyances comme à des biens car, « grâce à elles, nous pouvons nous sentir bien. Même notre façon de parler de nos croyances ressemble à notre façon de parler de ce que nous possédons : nous disons les “avoir”, y “accéder”, en “hériter”, les “abandonner” ».

« Les gens rationnalisent leurs actes de manière à réduire les divergences dans leurs systèmes de croyance. Un engagement antérieur à un système de croyance et un sacrifice personnel dressent des barrières qui empêchent la résolution de tout indice contradictoire. »

Lewis Wolpert, Six Impossible Things Before Breakfast

Marcelo Wolpert étant un scientifique, il s’approprie les convictions scientifiques. Il n’est donc pas étonnant qu’il les trouve crédibles et fiables. Comme ce sont des croyances répandues, scrutées, vérifiées et revérifiées, validées par ses pairs pourrait-on dire, elles ont de la valeur pour lui. Il n’est nul besoin de le croire sur parole quand il parle de l’organisation des tissus puisqu’il est convaincu qu’il véhicule une vérité plus vaste, attestée par l’expérience collective, et non par une impulsion personnelle.

Lorsque les règles de la relativité et du système quantique nous paraissent incroyables, impossibles ou absurdes, nous en concluons que nous n’en savons pas assez, tout simplement, pour tout comprendre. Même nos meilleurs cerveaux butent sur la dualité onde-particule, sur le rôle de l’observateur dans l’effondrement de la fonction d’onde, et sur la manière dont la gravité déforme l’espace-temps ; cependant, nous avons la certitude que la science trouvera le moyen d’avancer. Entre-temps, nous n’avons aucun mal à élaborer et admettre des histoires impossibles qui intègrent ces phénomènes pour notre plaisir.

D’où vient cette foi en la science ? Pourquoi, en premier lieu, croyons-nous que l’univers est effectivement explicable ?

DES CHOSES ENCORE PLUS IMPOSSIBLES

L’une des réponses incroyables est que les humains sont créés à l’image de Dieu. Le sociologue Steve Fuller déclare que, comme nous faisons partie de l’univers créé, nous avons une conviction intuitive qu’il existe un ordre mondial décryptable. C’est cette croyance en une création ordonnée qui permet l’entreprise scientifique, même si les scientifiques eux-mêmes ne l’admettent généralement pas. Fuller écrit que, « pour résumer, le progressisme scientifique naît de la sublimation, non de l’élimination, de Dieu en tant qu’aboutissement de la recherche organisée ». Selon lui, c’est un processus de sécularisation dans lequel « ce qui change, ce sont les instruments institutionnels, ce n’est pas le sentiment sous-jacent. [...] Cette foi en la puissance de l’investigation scientifique serait arbitraire sans une sensibilité salutiste importée de la théologie. »

Si telle est la vérité, la Bible, que beaucoup juge aussi incompréhensible que la physique, serait en fait plus claire qu’on ne le penserait de prime abord. Croire que Dieu est réel est une question de foi, de même que croire que l’Écriture est sa forme de communication avec nous (Hébreux 11 : 1, 6 ; Psaumes 18 : 31).

« Transformer les auteurs bibliques en penseurs et écrivains modernes ayant des connaissances scientifiques génère immédiatement des incohérences entre la Bible et l’histoire mondiale établie par la science. Cependant, en replaçant l’Écriture dans son contexte, ces incohérences disparaissent. C’est avec assurance que nous pouvons donc accepter l’Écriture comme la Parole divine révélée, même si elle ne résout pas précisément de nombreux points scientifiques et si elle se réfère souvent à l’univers naturel à partir des notions de l’époque à laquelle elle a été écrite. »

Karl W. Giberson et Francis S. Collins, The Language of Science and Faith

Du fait que les « choses impossibles » de la Bible dépassent le bon sens, allant même à l’encontre de l’intuition, on les appellerait des miracles. La relativité et la physique quantique sont aussi, à leur façon, des miracles. Si la reine Blanche était disposée à croire en six choses impossibles avant le petit-déjeuner, il faudrait que nous, nous soyons prêts à croire en bien plus que ce qui défie les processus physiques naturels. Des raisons logiques ont été avancées pour expliquer les plaies d’Égypte et la division de la mer Rouge (Exode 7‑11, 14), parmi lesquelles des vents inhabituels et divers phénomènes naturels, mais d’autres événements sont plus difficiles à concilier avec les lois de la physique.

Par exemple, Josué et Ézéchiel connurent tous deux des journées prolongées pendant lesquelles le soleil « s’arrêta » lors d’une bataille (Josué 10 : 12‑14) et l’ombre du cadran solaire recula en signe de l’Éternel (2 Rois 20 : 8‑11). Moïse déclara que Dieu l’avait appelé par l’intermédiaire d’un buisson ardent (Exode 3) et, selon lui, Dieu lui-même avait gravé les Commandements sur les tables de pierre (Exode 31 : 18).

« L’impossible » comprend aussi le fait que des personnes vécurent des centaines d’années (Genèse 5), ainsi qu’un déluge planétaire qui balaya la civilisation humaine (Genèse 7), une explication incroyable des multiples langues des hommes (Genèse 11), et la naissance d’enfants aux parents centenaires (Genèse 17 : 17 ; 21 : 1‑7). Évidemment, la liste pourrait continuer, le Nouveau Testament soumettant les questions encore plus grandes des guérisons et de la résurrection.

ACTE DE FOI

On parlerait d’un « Dieu bouche-trou ». L’écart entre ce que nous jugeons possible et ces événements paraît énorme, infranchissable. S’agit-il donc simplement de mettre notre incrédulité entre parenthèses pour admettre que la Bible est crédible ? Faut-il une croyance aveugle ? Bien que l’œuvre psychologique de Sigmund Freud ait été largement discréditée, avait-il raison de dire que la religion « implique un système d’illusions créées par le désir, avec négation de la réalité, système tel qu’on le retrouve, à l’état isolé, seulement dans [...] un état de confusion mentale bienheureux » ?

Tel n’est pas l’opinion de Sir John Polkinghorne, physicien et pasteur anglican qui a passé des décennies à étudier les rapports entre la religion et la science. Dans un entretien réalisé par Vision en 2010, il indiqua : « La croyance en Dieu ne consiste pas pour nous à fermer les yeux et à serrer les dents, ou à croire à l’impossible parce qu’une quelconque autorité incontestable nous dit de le faire. Une croyance religieuse se mesure de maintes façons, tout comme la croyance scientifique. »

John Polkinghorne ajouta : « Nous ne pouvons nier que nous sommes des êtres incarnés matériellement, mais nous ne sommes pas uniquement de nature matérielle. D’une certaine façon, nous sommes des amphibiens : nous appartenons au monde physique, tout en appartenant à une sorte d’univers mental et spirituel. Nous vivons en esprit et en substance. Cette expérience est, à mon avis, réelle et solide, mais elle est difficile à expliquer. »

« L’intelligence de Dieu sous-tend l’ordre fondamental du monde, et l’ordre exprime la nature de Dieu. »

Sir John Polkinghorne, Entretien avec Vision : « Holes In The Net »

Rejoignant Steve Fuller, Polkinghorne reconnaît la relation entre le créé et le Créateur. « Par exemple, en explorant le monde, nous avons découvert que sa structure de base obéissait à un ordre à la fois agréable et merveilleux. Dans mes années scientifiques, j’ai travaillé en physique des particules, et l’une des choses que nous avons découvertes est qu’il existe un ordre au cœur du monde. Il s’exprime dans de magnifiques équations mathématiques. La science l’exploite, sans pour autant expliquer d’où vient ce fait. C’est un fait extraordinaire au point que nous sommes capables de comprendre le monde en profondeur, et c’est en le faisant que nous vivons une merveille. »

Pour Albert Einstein, la vérité, c’était ce qui résiste à l’épreuve de l’expérience.

Nos vies regorgent de questions sur ce qui est réel et sur les raisons pour lesquelles les choses se passent comme elles se passent. À ces questions, nous recevons des réponses de tous côtés et de tous points de vue : sciences, divertissements, Écritures. Notre perception de ces diverses sources est filtrée par nos expériences et nos préjugés. Comme le note Lewis Wolpert, souvent ce qui est impossible, c’est ce que nous-mêmes avons déjà décidé comme étant des impossibilités : « Selon une caractéristique fréquente des croyances, quand ils examinent des indices relatifs à une conviction donnée, les gens ont tendance à voir ce qu’ils s’attendent à voir et ils en concluent ce qu’ils souhaitent en conclure. »

Le monde physique est doté d’une structure fondamentale profonde et étrange (révélée par les phénomènes insolites), celle-ci ne cessant d’être étudiée. Les Écritures révèlent également une facette de la réalité jusque-là dissimulée.

Comme le montre par analogie la parabole du semeur et des graines, les réponses, les informations et les idées nous parviennent sous différentes formes, mais le fait qu’elles aient finalement un sens ou une importance pour nous repose largement entre nos mains (Marc 4 : 2‑8). Un esprit ouvert ressemble à un jardin labouré ; il faut souvent faire acte de foi pour découvrir les vérités qui sont juste devant nous.