Ordre alphabétique

Notre alphabet fait tellement partie de notre vie quotidienne que nous y réfléchissons peu. Que nous prenions un journal ou un magazine, ou encore notre clavier pour envoyer un e-mail à l’autre coin du monde, quelle que soit notre langue, nous utilisons un alphabet.

Au niveau historique, l’établissement d’un alphabet est le signe d’une société structurée qui a développé des moyens complexes pour communiquer ses idées. C’est la raison pour laquelle les archéologues ont voulu découvrir la période à laquelle les alphabets ont commencé à être utilisés.

L’Égypte est remplie d’anciens hiéroglyphes qui communiquaient en utilisant des pictogrammes, par opposition à l’alphabet phonétique que nous utilisons à l’heure actuelle. Certaines langues orientales utilisent encore des pictogrammes. Bien que les Égyptiens aient continué de noter les évènements et détails importants sur des hiéroglyphes jusqu’à l’époque romaine, l’Égypte semble être le berceau de l’alphabet phonétique, duquel on estime que tous les alphabets utilisés à l’heure actuelle proviennent. Par contraste, la Mésopotamie ancienne communiquait à l’aide de caractères cunéiformes (en forme de coins) imprimés sur de l’argile. Même si ce système a progressivement évolué vers un alphabet syllabique, il a fini par être remplacé par l’araméen, une langue sémitique très proche de l’hébreu, et qui est devenu la norme sous les Perses.

Jusqu’à la fin du 20ème siècle, l’écriture phonétique et l’alphabet connus les plus anciens avaient été découverts dans des mines de cuivres dans la péninsule du Sinaï, à un endroit appelé Serabit el-Khadem. L’écriture fut datée de 1600 à 1500 av. J.-C. À partir de la nature de l’écriture, les experts estimèrent que l’alphabet avait été développé par un peuple sémitique sous influence égyptienne qui avait vécu en Syro-Palestine, une zone couvrant actuellement le Liban, la Syrie, Israël et la Palestine.

Mais une découverte relativement récente a renversé cette théorie. En 1994, l’érudit et égyptologue de Yale John Darnell et son épouse Deborah, ont découvert des inscriptions en Égypte, à Wadi el-Hol, un endroit inhospitalier situé dans le désert occidental du pays. Darnell et son équipe ont découvert ce qu’ils pensent être le chaînon manquant entre les hiéroglyphes égyptiens et l’alphabet phonétique.

L’écriture trouvée à Wadi el-Hol est datée de 1850 à 1750 av. J.-C., quelque 150 à 350 ans avant les inscriptions du Sinaï. Et qui plus est, l’inscription incorpore des caractères qui sont similaires à ceux qui ont été trouvés au Sinaï et dans des écrits sémitiques plus récents. Ceci a amené à la conclusion que l’alphabet, bien qu’il ait commencé en Égypte, fut en fait développé par un visiteur, un Asiatique occidental ou un Sémite selon d’autres références, qui cherchait un meilleur moyen de communication que la méthode égyptienne. Cet alphabet n’a pas eu vraiment de suites en Égypte, mais il a réussi à s’établir dans l’ancien Israël et la Phénicie, avant de finalement conquérir la plus grande partie du monde par le grec et le latin.

La découverte de Tel Zayit, avec celles de Byblos et Gezer, est bien plus importante que ce que suggèrent les détails physiques et l’origine de la pierre. Elle démontre non seulement les compétences au niveau de la langue et de la communication qu’avaient les habitants de l’ancien Israël et de la Phénicie à l’époque de l’écriture, mais également le développement entier des alphabets et de la communication écrite à partir de l’Égypte ancienne jusqu’à l’époque actuelle.